Le Président du Forum pour la Conscience et le Développement Pacifique Nininahazwe (voir la photo) estime que le Burundi vient de rater l’une des meilleures opportunités pour se réconcilier, en passant deux textes de projet l’un sur le CVR et l’autre sur la Cour Spéciale des terres et autres biens.
« D’abord je pense que nous venons de passer à coté de l’histoire. Ce n’est pas normal que les questions qui concernent la réconciliation soient traitées de manière unilatérale. La réconciliation se fera entre qui et qui ? C’est ma question après tout ce que je vois ici. Le parti CNDD FDD est l’une des parties aux conflits que nous avons connus .Ce n’est pas normal qu’un parti qui a joué un rôle dans le conflit examine seul les questions relatives à la réconciliation sans consulter les autres parties de burundais », analyse de Pacifique NINAHAZWE.
Selon la même source, si au moins il s’agissait d’un parti qui n’avait joué aucun rôle au conflit, là les choses seraient claires. Mais c’est un parti qui a fait la guerre, qui a commis des violations des droits de l’homme. Il est donc inconcevable qu’il décide seul les questions y relatives.
« Nous nous étonnons aussi que toutes les recommandations fondamentales qui ont été formulées aussi bien par la société civile, le parti UPRONA et les Nations Unies ont été ignorées dans ce processus de législation sur la CVR », ajoute le Président du FOCODE.
Il rappelle aussi un certain nombre d’obstacles à la réconciliation que la société civile avait soulevée : d’abord cette loi ne mentionne nulle part tout ce qui est relatif à la justice ; aux sanctions contre ceux qui ont commis de graves violations des droits humains ; le mécanisme de vetting qui a été exclu (le fait que la CVR devrait proposer une liste de personnes impliquées dans les crimes et qui ne devraient pas continuer à être responsabilisé dans certains services).
En plus selon cet activiste des droits de l’homme, ce projet de loi évoque la question de pardon ; mais la portée de ce pardon n’a pas été précisée. Il s’interroge si ces personnes pardonnées par les victimes ne seront pas concernées lorsqu’il s’agira de sanctionner les crimes graves alors que les crimes contre l’humanité, crimes de guerre et le génocide sont in-amnistiables.
Quant à la composition de la CVR, les burundais consultés avaient émis le souhait que les politiciens ne devraient pas figurer dans la CVR, maintenant c’est eux qui sont privilégiés et ce texte précise qu’on pourra ajouter des gens de la société civile ou ceux des confessions religieuses.
La question aussi de la sélection des candidats est primordiale : selon les consultations populaires, les burundais avaient estimés à plus de 80% qu’il fallait un mécanisme indépendant qui sélectionne les candidats commissaires, mais selon l’article 14 de ce projet de loi les candidats membres de la CVR sont sélectionnés sur base des candidatures libres par une commission ad hoc désignée par l’Assemblée Nationale.
Concernant le projet de loi portant création de la Cours Spéciale des Terres et autres Biens, la situation est presque similaire selon Pacifique NININAHAZWE :
« Nous avons exprimé nos préoccupations face à un texte qui instaure une Cour spéciale des terres et autres biens en violation de l’accord d’Arusha et d’autres engagements qui doivent être pris dans le processus de réconciliation des burundais”.
Il fait savoir que c’est une Cour qui va analyser des décisions qui étaient déjà contestées aujourd’hui, de surcroit qui va juger en premier et dernier ressort .
Cet aspect est plutôt anticonstitutionnel car la Constitution burundaise reconnait le principe de double degré juridiction(article 21 dudit texte).
La manière dont on nomme les juges de cette Cour est inquiétante, « c’est comme si il s’agira de nommer des juges spéciaux qui pourront être des juges d’une seule obédience politique ».
Pour ce le Président du FOCODE en appelle à la raison pour les autorités burundaises, faut-il qu’ils fassent tout pour réconcilier les burundais et non pour multiplier les actions qui pourront encourager la division entre les burundais.
Ces 2 projets de lois ont été analyses et adoptés par les députés du CNDD FDD seulement. Les autres groupes parlementaires dont celui de l’UPRONA, du FRODEBU NYAKURI et les représentants de la communauté Batwa ont boycotté la session de ce jeudi, ils jugent le contexte politique actuel inopportun pour les analyser vue leur ampleur.