Les Burundais se rappellent des morts de 1972

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    Au moins 500 fosses communes contenant des victimes des crises qu’a connues le Burundi ont été identifiées par l’Association pour la Mémoire et la Protection de l’Humanité contre les Crimes Internationaux (AMEPCI-Girubuntu) dont la majorité est celles des victimes des massacres de 1972.

    Selon son président Aloys Batungwanayo, dans une conférence de presse de ce mercredi en l’occasion de la commémoration des massacres de 1972 , les victimes des massacres « ont été jetées dans des fosses communes. On n’enterre pas normalement dans des fosses communes ».

    Cette association qui s’attend à l’avènement de la Commission Vérité et Réconciliation purement neutre, exige l’enterrement digne de nom des citoyens dont le nombre est inconnu, jetés dans des fosses communes.

    Rappelant que chaque mort a droit à la sépulture le président de l’AMEPCI s’est demandé pourquoi le Gouvernement est silencieux face à ces « fosses communes qui contiennent des citoyens paisibles victimes de la barbarie humaine ».

    Revenant sur les massacres de 1972 (dont la commémoration a été lancée le 29 avril), l’AMEPCI les qualifie comme « un crime d’Etat », dont le nombre de victime reste jusqu’ici inconnu.

    « Les preuves sont là. Mais on ne peut pas se limiter seulement aux accusations. C’est petit » a suggéré Père Désiré Yamuremye, membre aussi de cette organisation de la Société Civile.

    Selon lui, que chacun dépasse ce stade de porter des accusations contre les autres mais commence à chercher la vérité et non ces rumeurs sur « qui a commencé en 1972 ? ».

    Maitre Gabriel Sinarinzi Bâtonnier ai de l’ordre des Avocat de Bujumbura s’est demandé si la date du 29 avril coïncide réellement avec le début de ce qu’il appelle «massacres des hutus» ou le début de ce qu’il qualifie de « génocide contre les tutsis» surtout au sud du Burundi.

    En plus le Bâtonnier a donné la liste des gens, dont un certain Mpasha Celius, présumé leader de la rébellion muleliste (du nom de Pierre Mulele, rebelle congolais) accusé d’avoir lancé des attaques contre les civils tutsi du sud du Burundi.

    Mais selon Père Désiré Yamuremye, « ce n’est pas parce qu’un groupe de gens ait attaqué que le Gouvernement se cherche des victimes dans les citoyens ».

    Par ailleurs « il revient au Gouvernement de protéger sa population sans exception aucune » des agressions rebelles, ce que le Gouvernement d’alors n’a pas fait, ajoutant aussi que les discours de haine ont été émis par la Radio Nationale (Voix de la Révolution de l’époque) sur ordre du Gouvernement.

    Quant à la date du 29 avril, l’AMEPCI trouve qu’elle « coïncide réellement avec le début des massacres car le commandant Martin Ndayahoze (hutu) a été tué le même jour et bien d’autres burundais » au sud du pays, des tutsi cette fois-ci.

    Mais il déplore que les gens sentent de la sympathie pour un groupe de gens et gardent sang froid pour une autre catégorie.

    « Quand un tutsi est mort il faut en pleurer et faire de même quand il s’agit d’un hutu » selon Batungwanayo, qui ajoute que seul « aller au-delà des sentiments ethnistes pourra faire connaitre la vérité » dans un pays où la culture du mensonge se repend avec une allure inquiétante.

    « Culture du mensonge », c’est aussi le regret d’un diplomate présent dans cette conférence, qui explique que la société burundaise a essayé de rependre de génération en génération de fausses informations sur son histoire, consistant à désinformer l’opinion sur ce qui s’est réellement passé.

    {{Deux témoins importants toujours en vie}}

    Deux grands témoins, selon cette organisation qui défend les victimes des crimes commis au Burundi sont toujours vivants, bien que leur âge soit avancé.

    Il s’agit, selon l’AMEPCI-Girubuntu, de Celius Mpasha, leader présumé de la rébellion qui a attaqué le sud, tuant des tutsis à Vugizo et Rumonge, respectivement dans les provinces de Makamba et Bururi. Un autre témoin c’est le Pasteur Arthémon Simbananiye, Ministre des Relations Extérieurs d’alors devenu Ministre d’Etat la nuit du déclenchement des massacres.

    « Il faut faire vite parce que Mpasha Celius est encore en vie et a promis de parler » a souligné Père Yamuremye, ajoutant que ce dernier a déjà livré ces premières informations depuis sa résidence actuelle en Tanzanie.

    Mais le problème, selon cette association, c’est que le Pasteur Arthémon Simbananiye, accusé d’avoir élaboré un plan qui portait son nom (Plan Simbananiye pour éliminer l’élite Hutue) refuse toujours de donner sa version des faits, arguant qu’il est « un pasteur » donc non autorisé à se mêler des discussions mondaines.

    {{Des centaines de témoins au Congo}}

    Selon l’un des participants, les massacres de 1972 portent aussi un caché régional, arguant que même le président Congolais (Zaïrois de l’époque) Mobutu Sese Seko est intervenu pour le compte du Gouvernement Burundais.

    Selon ce participant qui a livré cette information à la presse sous couvert d’anonymat, le Congo en connait quelques choses.

    « Il suffit d’entrer en contact avec les anciens soldats qui sont intervenu, la diplomatie congolaise et même la présidence car la décision d’intervenir du coté de Micombero était une décision de la présidence zaïroise » continue notre source. Ces gens ont vue beaucoup de choses et ils peuvent témoigner et donner, d’une façon plus ou moins neutre, leurs versions des faits, du moins ce qu’ils ont vue (ou fait) continue t-il.

    Pour rappel, une attaque a eu lieu dans le sud du Burundi la nuit du 29 avril 1972. En même temps, des assassinats sont signalés à Bujumbura surtout dans les rangs de l’armée, de la gendarmerie, plus tard dans les écoles, selon des témoignages variés.

    Le 1er Mai 1972 la rébellion va déclarer la République de Martyazo avec comme président Antoine Serukwavu, selon certaines informations, une république sécessionniste située dans les montagnes de la commune Vugizo (province actuelle de Makamba) et qui n’a duré qu’une seule semaine.

    Jean Pierre Chrétien, auteur Français (qui a cité un prélat catholique Hutu Léopold Mvukiye originaire de cette région) dit que dans cette « république » « de Martyazo ils (les rebelles, Ndrl) ont aussi entrepris de rassembler les Hutu de la région pour organiser les « tribunaux populaires » pour juger les tutsis saisis dans les bananerais. Cela a duré une semaine, des tutsis ont été tués d’autre épargnés ou cachés par des Hutus qui n’adhéraient pas au mouvement ».

    Le drapeau de la « république éphémère de Martyazo » selon Chrétien avait une couleur verte barrée en diagonale par une autre couleur rouge. Elle se rapprochait à celui de la Tanzanie. « Hasard ? » se demande JP Chrétien, qui dit que ce mouvement venait de l’autre coté de la Malagarazi.

    Quelques temps après, « la répression » du Gouvernement Micombero se rependra dans les autres provinces du pays, à commencer par les écoles secondaires, les services de l’Etat comme l’armée la gendarmerie, les ministères, visant essentiellement certains intellectuels hutu, selon les archives de Radio Canada.

    Le livre Blanc du Gouvernement de l’époque, va annoncer, dans la deuxième semaine de Juin 1972 un effectif de 80.000 victimes de ces massacres qui, jusqu’ici ne sont pas encore qualifiées par les institutions compétentes.

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